Vous avez déjà ressenti cette douleur sourde dans l’oreille pendant la descente d’un avion ? Cette sensation d’oreille bouchée, parfois accompagnée de bourdonnements ou même de douleur aiguë, c’est le barotraumatisme aérien, aussi appelé « oreille d’avion ». Ce n’est pas juste une gêne passagère - c’est un phénomène physiologique réel, causé par une différence de pression entre l’extérieur et votre oreille moyenne. Et si vous avez un nez bouché, une infection récente, ou même des allergies, ce problème peut devenir bien plus sérieux.
Comment ça marche ?
Votre oreille moyenne est une cavité remplie d’air, reliée à l’arrière du nez par un petit tube appelé tube d’Eustache. Ce tube s’ouvre naturellement quand vous avalez, bâillez ou mâchez. Son rôle ? Équilibrer la pression entre l’extérieur et votre oreille. Mais pendant un vol, les choses changent vite.
En montée, la pression dans la cabine diminue - environ 0,5 psi pour chaque 1 000 pieds d’altitude. Votre tympan se courbe vers l’extérieur. En descente, c’est l’inverse : la pression augmente, et votre tympan est aspiré vers l’intérieur. Si le tube d’Eustache ne s’ouvre pas à temps, la pression ne s’équilibre pas. Résultat : une tension sur le tympan, une sensation de plénitude, et parfois une douleur intense. Chez les enfants, ce tube est plus court et plus horizontal - ce qui explique pourquoi 22 % d’entre eux souffrent de ce problème, contre 10 % des adultes.
Les méthodes pour égaliser la pression
Il existe plusieurs techniques pour forcer le tube d’Eustache à s’ouvrir. Pas toutes sont aussi efficaces ou sûres.
- Avaler ou bâiller : La méthode la plus simple, et la plus sûre. Elle fonctionne dans 65 % des cas. Essayez de mâcher un chewing-gum ou de boire une gorgée d’eau pendant la descente. Pour les bébés, donner un biberon ou une tétine pendant la descente augmente les chances d’égalisation de 43 % par rapport à simplement boire dans un verre.
- Manœuvre de Toynbee : Pincez votre nez et avalez. Cela crée une pression positive dans la gorge, aidant à ouvrir le tube. Elle est plus douce que la manœuvre de Valsalva, mais moins efficace - seulement 68 % de réussite selon les études.
- Manœuvre de Valsalva : Pincez votre nez et soufflez doucement comme si vous vouliez souffler un ballon. C’est la plus connue, et elle fonctionne dans 82 % des cas. Mais attention : si vous soufflez trop fort, vous risquez d’endommager votre oreille interne. Des cas de perforation ou de vertiges ont été documentés quand les gens forcent comme s’ils essayaient de déboucher un tuyau.
- Technique de Lowry : Une combinaison des deux précédentes - pincez votre nez, avalez et soufflez doucement en même temps. Elle atteint 89 % d’efficacité, mais demande de la pratique. Beaucoup de gens ne la maîtrisent pas après trois vols.
- Ouverture volontaire du tube : C’est une technique avancée. Vous contractez les muscles du voile du palais en avançant la mâchoire. Elle a 92 % d’efficacité… mais nécessite 8 à 12 semaines d’entraînement quotidien. Pas pratique pour un voyage ponctuel.
Une astuce simple mais souvent ignorée : bougez votre mâchoire d’un côté à l’autre en avalant. Des études de SingHealth montrent que cela améliore la réussite de l’égalisation de 22 % chez les enfants.
Les bouchons d’oreilles spécialisés
Les bouchons comme EarPlanes ne bloquent pas le son - ils ralentissent le changement de pression. Ils contiennent un filtre céramique qui réduit le taux de variation de pression de 37 %. Cela donne à votre tube d’Eustache 28 secondes au lieu de 15 pour s’ajuster. Ils sont efficaces dans 76 % des cas, mais leur performance chute à 42 % chez les personnes ayant un dysfonctionnement chronique du tube d’Eustache.
Leur prix ? Environ 5 $ la paire. Ils sont vendus dans les aéroports et les pharmacies. Pas une solution magique, mais un bon complément aux techniques manuelles.
Les décongestionnants : une aide, pas une solution
Si vous avez le nez bouché, un décongestionnant nasal peut faire toute la différence. Les sprays comme l’oxymétazoline (Afrin) réduisent l’enflure des muqueuses de 63 % en 10 minutes. L’effet dure 4 à 6 heures. Prenez-les 30 à 60 minutes avant la descente.
Les comprimés comme la pseudoéphédrine (Sudafed) agissent plus longtemps - jusqu’à 12 heures. Mais ils ne sont pas sans risque. Chez les adultes de plus de 40 ans, 12 % peuvent avoir des effets secondaires cardiaques : accélération du rythme cardiaque, hypertension. Et surtout : ne donnez jamais de décongestionnants aux enfants de moins de 6 ans. Des cas de tachycardie ont été rapportés à la FDA.
Une alternative plus sûre : les sprays nasaux à base de stéroïdes comme la fluticasone. Ils réduisent l’inflammation du tube d’Eustache de 61 %, selon une étude de l’Université de Pennsylvanie. Mais ils doivent être utilisés quotidiennement pendant plusieurs jours avant le vol - pas une solution de dernière minute.
Quand éviter de voler
Si vous avez une infection des voies respiratoires supérieures, une sinusite active, ou une otite, il vaut mieux reporter votre vol. La pression peut aggraver l’inflammation, voire provoquer une perforation du tympan - un événement rare (0,02 % des cas), mais très douloureux.
Les personnes avec un dysfonctionnement chronique du tube d’Eustache sont plus à risque. Certaines se tournent vers des procédures médicales comme la dilatation par ballon - une intervention mini-invasive où un petit ballon est inséré dans le tube et gonflé pour l’élargir. Elle a 76 % de succès à long terme, mais coûte entre 3 800 et 5 200 $ aux États-Unis. En France, cette procédure est encore peu répandue, mais elle est disponible dans certains centres spécialisés.
Les erreurs à éviter
La plupart des gens attendent d’avoir mal pour agir. C’est déjà trop tard. Le tube d’Eustache ne s’ouvre plus aussi facilement quand la pression est trop déséquilibrée.
- Attendre la douleur : 68 % des personnes qui souffrent d’oreille d’avion disent avoir attendu trop longtemps.
- Souffler trop fort : 41 % des blessures liées à la manœuvre de Valsalva viennent d’un effort excessif.
- Dormir pendant la descente : C’est la cause principale de douleurs chez les enfants. 73 % des cas sont liés à un sommeil pendant la descente. Réveillez votre enfant 20 minutes avant l’atterrissage et donnez-lui à boire.
- Ne pas pratiquer à l’avance : Une étude de l’ENT Orlando montre que ceux qui font des exercices de déglutition quotidiens pendant une semaine avant le vol réduisent leurs risques de 57 %.
Les avions modernes font mieux
Les nouveaux avions comme le Boeing 787 maintiennent la pression de la cabine à 6 000 pieds d’altitude - au lieu des 8 000 pieds habituels. Cela réduit la différence de pression de 25 %. Delta Airlines a aussi adopté des descentes plus douces (3 degrés au lieu de 3,5), ce qui ralentit la montée de pression de 14 %.
À l’avenir, les écouteurs intelligents avec capteurs de pression (en test par Bose) pourraient vous alerter en temps réel quand vous devez égaliser. Et la FAA prévoit, d’ici 2025, d’exiger que tous les nouveaux avions maintiennent une altitude de cabine inférieure à 6 500 pieds pendant les phases critiques.
Comment préparer votre prochain vol
Voici un plan simple, basé sur les meilleures pratiques médicales :
- 3 jours avant le vol : utilisez un spray nasal stéroïde (fluticasone) si vous avez des allergies ou une tendance à la congestion.
- Le jour du vol : prenez un décongestionnant nasal 45 minutes avant la descente (si vous êtes adulte et sans problème cardiaque).
- À l’embarquement : achetez des bouchons d’oreilles EarPlanes ou similaires.
- En montée : ne faites rien. Votre oreille s’ajuste naturellement.
- 20 minutes avant l’atterrissage : commencez à avaler, mâcher, bâiller. Utilisez la manœuvre de Toynbee si vous sentez une pression.
- Si rien ne fonctionne : essayez la manœuvre de Valsalva, mais doucement - comme si vous souffliez dans une paille.
- Pour les enfants : donnez-leur un biberon, une tétine ou un chewing-gum dès que la descente commence.
La clé ? Ne laissez pas la pression s’accumuler. Agissez tôt, régulièrement, et doucement.
Pourquoi les enfants ont-ils plus souvent mal aux oreilles en avion ?
Le tube d’Eustache des enfants est plus court, plus horizontal et plus étroit que chez les adultes. Il est aussi plus facilement obstrué par les mucosités ou les infections. De plus, ils ne savent pas toujours comment égaliser la pression par eux-mêmes. C’est pourquoi donner un biberon ou une tétine pendant la descente est si efficace : la succion force la déglutition, ce qui ouvre naturellement le tube.
Est-ce que les bouchons d’oreilles normaux aident ?
Non. Les bouchons d’oreilles classiques bloquent le son, mais pas la pression. Ils peuvent même aggraver le problème en empêchant toute variation de pression. Seuls les bouchons avec filtre céramique, comme EarPlanes, sont conçus pour ralentir le changement de pression de manière contrôlée. Ils ne sont pas des bouchons ordinaires.
Puis-je utiliser un décongestionnant si j’ai de l’hypertension ?
Non, c’est déconseillé. Les décongestionnants comme l’oxymétazoline ou la pseudoéphédrine peuvent augmenter la pression artérielle et accélérer le rythme cardiaque. Si vous avez de l’hypertension, des troubles du rythme cardiaque ou des problèmes de thyroïde, parlez à votre médecin avant de les prendre. Privilégiez les sprays nasaux stéroïdes ou les techniques manuelles.
Quand faut-il consulter un ORL après un vol ?
Consultez un ORL si la douleur persiste plus de 48 heures, si vous avez une perte auditive, des bourdonnements constants, des vertiges, ou un écoulement de liquide ou de sang de l’oreille. Ces signes peuvent indiquer une perforation du tympan ou une otite barotraumatique. Même si la douleur s’est calmée, une évaluation médicale est recommandée si vous avez eu un épisode sévère.
Est-ce que la manœuvre de Valsalva peut endommager l’oreille ?
Oui, si elle est mal faite. Forcer trop fort peut envoyer de l’air dans l’oreille interne, provoquant des vertiges, une perte auditive temporaire, ou même une perforation du tympan. Le risque est faible (0,3 % des tentatives), mais réel. La règle d’or : soufflez doucement, comme si vous essayiez de dégager un nez bouché avec un mouchoir - pas comme si vous vouliez faire exploser un ballon.